vendredi 10 avril 2009

La réponse de Noémie....

Ce matin, dans ma boite mail, une réponse de Noémie sur mon texte posté hier.
J'en ai pleuré...D'ailleurs, à chaque fois que je la relis, j'ai la gorge nouée....

Voici donc sa lettre.
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Ma toute jolie,

Je ne sais pas comment te dire à quel point tu comptes pour moi.
Ton post m’a touchée.
En réponse, j’ai décidé de te dire comment j’ai vécu cette annonce.
Par pudeur, je ne te l’ai jamais dit.

Je t’aime.

Noémie.


Paris - Octobre 2008 .

A peine 2 semaines que je viens de me ré-installer à Paris après des années d’expatriation.
Je me retrouve enfin chez moi ! Je me retrouve enfin parisienne !! Je suis toute excitée !
Et en plus, Elisabeth a prévu de revenir à Paris pour une semaine de vacances. Pile Poil !
Les retrouvailles dans notre ville natale , j’ai hâte ! ça fait longtemps !

Elisabeth, c’est une des plus belles rencontres que j’ai faites dans ma vie.
Nos moments sont magiques et beaux, impossible de vous les décrire, c’est juste sublime.
Cette complicité que l’on peut avoir, cette confiance … – c’est simple, Elisabeth est un cadeau dans ma vie !

Elisabeth arrive ce soir à Paris !!! ça fait longtemps qu’on ne s’est pas retrouvées toutes les deux ! La dernière fois qu’on s’est vues, c’était en Mai chez elle, là-bas.

Entre temps, il y eut un séjour à l’hôpital – courant juin.
Je me suis inquiétée, je ne comprenais pas trop ce qu’il se passait.
Quelque chose aux poumons … mais ce n’était pas grave disait-elle.
Une sorte de pneumonie ….

Des jours, des semaines passent. Elle est toujours à l’hôpital.
J’essaye d’avoir plus d’explications. Non, c’est assez flou, mais «  ça va aller » …

Elisabeth me dit que ses parents sont descendus la voir.
Ça doit être grave.
J’essaye de sonder, j’écoute le son de sa voix, sa façon de parler.
Sa voix est positive. Je la crois.

Mais je ne cache pas que j’aie eu des pensées noires …
Un cancer ? Elisabeth a un cancer ? Elle ne veut pas me le dire ?
Elle ne veut pas me le dire parce que, vu mon histoire, elle veut me protéger ?

Dernières nouvelles, elle est arrêtée plus d’un mois.
Un mois, c’est long quand même !
Je l’ai au téléphone, sa respiration est courte, elle a du mal à respirer.
Je m’inquiète mais je ne le montre pas. Je reste positive via mes paroles, via ma façon de parler.

Je l’ai régulièrement au téléphone.
Sa voix est de mieux en mieux.
Sa respiration aussi.

Aujourd’hui, nous sommes en Octobre.
Elle est sortie de l’hôpital, elle a repris le boulot. Tout semble pour le mieux.

Et ce soir, je vois Elisabeth !!!!!!!!!


La sonnette retentit .
J’ouvre la porte.
Je la vois toute souriante.
Quel bonheur de la revoir !

On sort illico, direction resto.
Je me rappelle, c’est le jour où Guillaume Depardieu est mort d’une pneumonie « foudroyante ».
Je lui ai posé l’éternelle question : comment vas-tu ? Est-ce que tout va bien ?
Ses joues se sont creusées mais je me suis dis que c’était normal après des semaines à l’hôpital.
Toujours cette réponse assez flou – oui tout va bien, je me fais suivre mais tout va bien.
( mais pourquoi se faire suivre si tout va bien ??! )

On arrive au resto.
Enfin ! Posées, on est assises.
La soirée peut commencer.

Je vois mon Elisabeth me regarder intensément.
Je comprends qu’il y a quelque chose qui ne va pas.

Sa respiration se fait de plus en plus difficile, des larmes commencent à sortir.
Elle veut me dire quelque chose et ça n’arrive pas à sortir.
Sa voix, ses paroles sont coupées par les larmes …

Mon cœur, ma respiration se sont stoppés nets.
Je suis désemparée. Et j’ai peur.
Je comprends qu’il y a quelque chose de grave.
J’ai peur de ce qu’elle va m’annoncer.

On sait que pour toutes les deux, ce moment va être très difficile et très douloureux pour l’une comme pour l’autre.

Et dans ces moments là, on ne réfléchit pas. Tout est instinctif.
Je me lève de ma chaise, je m’assois à côté d’elle. Je lui prends la main et je la serre très fort pour l’aider à parler. Pour lui montrer que je suis là.
Et au fond de moi, je suis morte de trouille.

Ça commence à sortir.
Des mots, des pleurs, des sanglots …
J’ai du mal à comprendre.
Je comprends que c’est grave.
Elle continue à me parler.
Je l’écoute, mais je ne comprends pas tout.
Elle me parle d’une maladie aux poumons …
Mais je la connais pas, je ne comprends pas.
Elle continue à me parler.
Ses larmes continuent couler.

Et là …
La phrase qui résonnera toujours dans ma tête ….

'… c’est une des maladies du HIV.'

Le temps n’existe plus.

Tout s’est arrêté autour de moi.

Mon amie Elisabeth venait de m’annoncer qu’elle était atteinte du sida.

Je l’ai prise dans mes bras. J’en avais besoin …

Besoin de la sentir dans mes bras.
Besoin de la sentir vivante.
Besoin de lui montrer que j’étais là.
Besoin de lui dire que je l’aimais.
Besoin de lui dire que, n’importe quelle maladie, rien n’allait nous séparer.

Je n’ai jamais su trouver les mots dans les moments d’émotion …
Mes mots étaient mes gestes.

Je n’ai pas pleuré. Pas sur le coup.
Seules, mes mains tremblantes trahissaient mon émotion.

Sa 2ème phrase : «  mais je ne vais pas mourir ! »
Elle avait compris ce que j’avais besoin d’entendre.

Elle m’a parlé, m’a expliqué.
Je l’écoutais mais je crois à demi-mot. Toujours en état de choc je crois.
Elle n’allait pas mourir et c’est tout ce que je voulais entendre.
Peu importait du pourquoi du comment, elle allait continuer à vivre.

Je n’ai pas voulu savoir comment elle avait été contaminée.
Lui dire : quoi ? tu ne t’es pas protégée ? Mais qui t’a contaminé ?
Pourquoi faire ?
A quoi ça servait ?
La vie est devant nous, elle venait de me dire une phrase magique ‘ je ne vais pas mourir ‘.
C’est tout ce que je voulais savoir. Elle n’allait pas mourir.


Cette nuit là, je n’ai pas dormi de la nuit. Nuit blanche.
J’ai revécu la scène du restaurant 40 000 fois…
J’ai pleuré en silence, j’étais en colère.
En colère contre la vie, de ses injustices, de ces coups durs.

Le lendemain, je me rappelle, dans les transports, pour aller au boulot, je pleurais – ça sortait tout seul.
J’en avais besoin.
J’avais besoin d’évacuer ce trop plein d’émotion.

Je n’ai jamais pleuré devant Elisabeth, jamais.
Par pudeur, je ne sais pas. Toujours voulu garder mon optimisme ?
Je ne sais pas.

Ça a duré en tout est pour tout 1 nuit et 1 jour. Ni plus ni moins.
Le lendemain soir, j’avais digéré, analysé, réfléchi.

Elisabeth, MON Elisabeth n’allait pas mourir.
Certes, allait prendre des médicaments à vie, ça n’allait pas être facile, elle allait en chier mais elle n’allait pas mourir et elle allait vivre !!
Oui, elle allait avoir des moments plus que pénibles, mais j’allais être là et Thomas aussi.

Le samedi arrive, nous passons la journée ensemble.
On en parle naturellement et j’aime ça - j’en ai besoin.
J’ai besoin d’en parler.
Et je pense qu’Elisabeth aussi.

Cette maladie n’a pas de place entre nous, elle n’affectera jamais ni notre amitié, ni mes sentiment envers Elisabeth.
Et elle l’a compris.

Personne de nos amis en commun ne le sait.
C’est son secret.
Si j’ai besoin d’en parler, c’est avec Elisabeth directement que j’en parlerai.

Dans quelques semaines, je vais la retrouver.
Toutes les deux, loin de tout.
Besoin de la voir, besoin de me retrouver avec elle.
J’ai hâte !
Elisabeth, c’est mon bonheur !


Ma jolie, c’est pas trop mon genre de me dévoiler comme ça, mais je pense que c’est important que tu le saches.

Je t’aime.
Noémie.

4 commentaires:

  1. Wahou, j'ai le souffle coupé.
    Une amitié aussi belle et aussi intense, qu'elle bonheur. Et je ne trouve pas les mots pour décrire ce que je ressens en lisant cette déclaration. Juste que c'est tout flou et que quelqu'un a collé de la buée sur mon écran.
    C'est une sublime histoire d'amour que vous nous dévoilez ici toutes les deux. Un diamant dans son écran de velours noir. Merci pour ce partage !

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  2. C'est dingue à quel point je me retrouve dans ce qu'elle a dit.
    La difference est que lui n'a pas pleuré en me l'annonçant, mais que moi si...
    Tout qui s'arréte quand il prononce les mots VIH, ce besoin de le sentir dans ses bras. Le reflexe qu'il a aussi eu de dire qu'il allait bien !! Et ce beoin que j'avais de l'entendre.
    Surtout ce besoin de le prendre dans mes bras pour qu'il sache que ça n'allait jamais rien changer entre nous, que je l'aimait, que j'étais là. Et de sentir qu'il était là aussi.
    Auncun reproche, peu de paroles. Beaucoup d'etreintes et de bisous.
    Ne le repeter à peronne non plus... et ne pas lui dire non plus ce que j'avais ressenti ce jour là... Peut etre un jour lui dirais-je :)

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  3. T'es chiante de me faire pleurer comme cela !!
    (chuis pas habitué, moi)

    En tout cas je t'aime et merci à Noémie d'être là,
    Noémie que je connais si peu......

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  4. @Gloups : Moi aussi j'avais de la buée partout sur l'écran, c'est fou ce truc qui se colle au coeur...

    @Emmah : Notre histoire d'amitié se ressemble. Et c'est bon d'avoir des amis...wouah !

    @Anomyme : Je n'ai qu'un but en écrivant ce blog : te faire pleurer :-)
    C'est vrai que tu ne connais pas Noémie... C'est bizarre d'ailleurs, il faudra y remédier !
    Je t'aime.

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