mardi 28 avril 2009

Je suis con...

L'autre jour, je suis allée chez Body Shop.
A la caisse, un beurre à lèvres. Une partie est reversée pour la lutte contre le sida.
Je suis con. Je l'ai acheté, alors que l'odeur ne me plait pas plus que ça.



The_body_shop_YES_gif


lundi 27 avril 2009

Optimisme de forcenée...

Ce week-end une balade à Sète m'a emmené au Centre Régional d'Art Contemporain du Languedoc Roussillon.
L'affiche présentait Agnès Varda, Steeve Iuncker et Bertrand Grossol. Je ne connaissais pas les 2 derniers.
Agnès Varda et ses plages..Toujours sublime, touchante, émouvante. Je déambule dans les salles. Je continue avec la découverte des 2 autres, là haut, à l'étage.
Des photos un peu trash de chirurgie esthétique, le prix à payer pour être et rester beau, un style à la Martin Parr... mouaih...Pour quoi pas.

Au fond une petite salle. Sur ces murs, des planches contacts.
Je lis l'introduction. Les photos sont de Steeve Iuncker. Elles datent de 1996. Il explique qu'il a rencontré Xavier par hasard. Xavier se sait condamné. Steeve Iuncker entreprend de le prendre en photo chaque semaine jusqu'à sa mort. Et chaque semaine Xavier choisit la photo de la séance précédente qu'il préfère en expliquant pourquoi. Et ça a duré 2 ans. Jusqu'à ce que Xavier meurt.

Le cadre est posé. Rien d'autres n'est dit. Rien sur la maladie. Rien. Je pars à la découverte du projet, curieuse, innocente.
Je commence à lire les explications de choix de Xavier. Je me demande où ça va nous mener. Au bout de 4 planches, je lis un truc de Xavier qui dit quelque chose du genre qu'il choisit cette photo parce qu'il sourit alors qu'il sait que ces T4 ont chuté. Arrêt sur image. Arrêt du temps. Je regarde Thomas horrifiée. Xavier meurt du Sida ! C'est pas possible ! Je regarde la date 1996... ça veut dire qu'il est mort en 1998 ? On mourrait encore du sida en 1998. Mais la tri-thérapie existait déjà... Je sors immédiatement de la salle. Sans aller au bout. Je ne dis rien. Je suis avec des amis qui ignorent que j'ai le virus. Je fais bonne figure. Dans ma tête, ça se bouscule. Et si les médecins mentaient ? Je vais mourir. Je m'obstine dans un optimisme béat. je ne lis rien sur la maladie, les traitements, le % de fausse-couche... j'essaie de me préserver de la connaissance de toutes ces catastrophes sidéennes. Mais en vrai, je vais crever de cette merde qui se balade partout dans mon corps. Cet intrus que j'ai laissé entrer comme une conne inconsciente. Je suis atterrée. J'essaie de passer à autre chose, j'essaie de ne pas laisser ses idées morbides m'envahir. Jusqu'ici tout va bien, jusqu'ici tout va bien. On efface ces craintes, ou plutôt on les range dans un petit coin, bien entassées, bien pliées pour qu'elles ne soient pas trop envahissantes et on sourit. On sourit à l'homme de sa vie, à ses amis, à la ville de Sète, à l'éclaircit dans le ciel, aux projets... On sourit à la vie. A la vie.

mercredi 15 avril 2009

De l'inconvénient du secret à l'art de s'adapter...

Aujourd'hui, petite leçon sur l'art de se cacher pour prendre ses médicaments.

1er obstacle : je dois les prendre pendant que je mange.
Et les médicaments sont donc rangés dans ma cuisine.

2ème obstacle : les personnes qui viennent à l'improviste.
ça ne me dérange pas. Au contraire, c'est un plaisir. Mais il faut que je ruse pour aller prendre mes médicaments.
Mon astuce : j'ai toujours une dose dans mon sac. Du coup, je prends mon sac et je fais semblant d'aller le ranger dans ma chambre.
Idem si je suis au resto, je me lève de table, prétextant une envie...

3ème obstacle : les personnes qui restent chez nous plusieurs jours.
ça ne me dérange toujours pas. C'est toujours un plaisir. Mais là, je dois carrément changer mes médicaments de place. Les ranger dans ma chambre. Et faire des allers/retours matin et soirs. Et surtout ne pas oublier de les prendre.

Rien de grave en soi... Je joue seulement à cache-cache avec mes invités.

vendredi 10 avril 2009

La réponse de Noémie....

Ce matin, dans ma boite mail, une réponse de Noémie sur mon texte posté hier.
J'en ai pleuré...D'ailleurs, à chaque fois que je la relis, j'ai la gorge nouée....

Voici donc sa lettre.
:::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::
Ma toute jolie,

Je ne sais pas comment te dire à quel point tu comptes pour moi.
Ton post m’a touchée.
En réponse, j’ai décidé de te dire comment j’ai vécu cette annonce.
Par pudeur, je ne te l’ai jamais dit.

Je t’aime.

Noémie.


Paris - Octobre 2008 .

A peine 2 semaines que je viens de me ré-installer à Paris après des années d’expatriation.
Je me retrouve enfin chez moi ! Je me retrouve enfin parisienne !! Je suis toute excitée !
Et en plus, Elisabeth a prévu de revenir à Paris pour une semaine de vacances. Pile Poil !
Les retrouvailles dans notre ville natale , j’ai hâte ! ça fait longtemps !

Elisabeth, c’est une des plus belles rencontres que j’ai faites dans ma vie.
Nos moments sont magiques et beaux, impossible de vous les décrire, c’est juste sublime.
Cette complicité que l’on peut avoir, cette confiance … – c’est simple, Elisabeth est un cadeau dans ma vie !

Elisabeth arrive ce soir à Paris !!! ça fait longtemps qu’on ne s’est pas retrouvées toutes les deux ! La dernière fois qu’on s’est vues, c’était en Mai chez elle, là-bas.

Entre temps, il y eut un séjour à l’hôpital – courant juin.
Je me suis inquiétée, je ne comprenais pas trop ce qu’il se passait.
Quelque chose aux poumons … mais ce n’était pas grave disait-elle.
Une sorte de pneumonie ….

Des jours, des semaines passent. Elle est toujours à l’hôpital.
J’essaye d’avoir plus d’explications. Non, c’est assez flou, mais «  ça va aller » …

Elisabeth me dit que ses parents sont descendus la voir.
Ça doit être grave.
J’essaye de sonder, j’écoute le son de sa voix, sa façon de parler.
Sa voix est positive. Je la crois.

Mais je ne cache pas que j’aie eu des pensées noires …
Un cancer ? Elisabeth a un cancer ? Elle ne veut pas me le dire ?
Elle ne veut pas me le dire parce que, vu mon histoire, elle veut me protéger ?

Dernières nouvelles, elle est arrêtée plus d’un mois.
Un mois, c’est long quand même !
Je l’ai au téléphone, sa respiration est courte, elle a du mal à respirer.
Je m’inquiète mais je ne le montre pas. Je reste positive via mes paroles, via ma façon de parler.

Je l’ai régulièrement au téléphone.
Sa voix est de mieux en mieux.
Sa respiration aussi.

Aujourd’hui, nous sommes en Octobre.
Elle est sortie de l’hôpital, elle a repris le boulot. Tout semble pour le mieux.

Et ce soir, je vois Elisabeth !!!!!!!!!


La sonnette retentit .
J’ouvre la porte.
Je la vois toute souriante.
Quel bonheur de la revoir !

On sort illico, direction resto.
Je me rappelle, c’est le jour où Guillaume Depardieu est mort d’une pneumonie « foudroyante ».
Je lui ai posé l’éternelle question : comment vas-tu ? Est-ce que tout va bien ?
Ses joues se sont creusées mais je me suis dis que c’était normal après des semaines à l’hôpital.
Toujours cette réponse assez flou – oui tout va bien, je me fais suivre mais tout va bien.
( mais pourquoi se faire suivre si tout va bien ??! )

On arrive au resto.
Enfin ! Posées, on est assises.
La soirée peut commencer.

Je vois mon Elisabeth me regarder intensément.
Je comprends qu’il y a quelque chose qui ne va pas.

Sa respiration se fait de plus en plus difficile, des larmes commencent à sortir.
Elle veut me dire quelque chose et ça n’arrive pas à sortir.
Sa voix, ses paroles sont coupées par les larmes …

Mon cœur, ma respiration se sont stoppés nets.
Je suis désemparée. Et j’ai peur.
Je comprends qu’il y a quelque chose de grave.
J’ai peur de ce qu’elle va m’annoncer.

On sait que pour toutes les deux, ce moment va être très difficile et très douloureux pour l’une comme pour l’autre.

Et dans ces moments là, on ne réfléchit pas. Tout est instinctif.
Je me lève de ma chaise, je m’assois à côté d’elle. Je lui prends la main et je la serre très fort pour l’aider à parler. Pour lui montrer que je suis là.
Et au fond de moi, je suis morte de trouille.

Ça commence à sortir.
Des mots, des pleurs, des sanglots …
J’ai du mal à comprendre.
Je comprends que c’est grave.
Elle continue à me parler.
Je l’écoute, mais je ne comprends pas tout.
Elle me parle d’une maladie aux poumons …
Mais je la connais pas, je ne comprends pas.
Elle continue à me parler.
Ses larmes continuent couler.

Et là …
La phrase qui résonnera toujours dans ma tête ….

'… c’est une des maladies du HIV.'

Le temps n’existe plus.

Tout s’est arrêté autour de moi.

Mon amie Elisabeth venait de m’annoncer qu’elle était atteinte du sida.

Je l’ai prise dans mes bras. J’en avais besoin …

Besoin de la sentir dans mes bras.
Besoin de la sentir vivante.
Besoin de lui montrer que j’étais là.
Besoin de lui dire que je l’aimais.
Besoin de lui dire que, n’importe quelle maladie, rien n’allait nous séparer.

Je n’ai jamais su trouver les mots dans les moments d’émotion …
Mes mots étaient mes gestes.

Je n’ai pas pleuré. Pas sur le coup.
Seules, mes mains tremblantes trahissaient mon émotion.

Sa 2ème phrase : «  mais je ne vais pas mourir ! »
Elle avait compris ce que j’avais besoin d’entendre.

Elle m’a parlé, m’a expliqué.
Je l’écoutais mais je crois à demi-mot. Toujours en état de choc je crois.
Elle n’allait pas mourir et c’est tout ce que je voulais entendre.
Peu importait du pourquoi du comment, elle allait continuer à vivre.

Je n’ai pas voulu savoir comment elle avait été contaminée.
Lui dire : quoi ? tu ne t’es pas protégée ? Mais qui t’a contaminé ?
Pourquoi faire ?
A quoi ça servait ?
La vie est devant nous, elle venait de me dire une phrase magique ‘ je ne vais pas mourir ‘.
C’est tout ce que je voulais savoir. Elle n’allait pas mourir.


Cette nuit là, je n’ai pas dormi de la nuit. Nuit blanche.
J’ai revécu la scène du restaurant 40 000 fois…
J’ai pleuré en silence, j’étais en colère.
En colère contre la vie, de ses injustices, de ces coups durs.

Le lendemain, je me rappelle, dans les transports, pour aller au boulot, je pleurais – ça sortait tout seul.
J’en avais besoin.
J’avais besoin d’évacuer ce trop plein d’émotion.

Je n’ai jamais pleuré devant Elisabeth, jamais.
Par pudeur, je ne sais pas. Toujours voulu garder mon optimisme ?
Je ne sais pas.

Ça a duré en tout est pour tout 1 nuit et 1 jour. Ni plus ni moins.
Le lendemain soir, j’avais digéré, analysé, réfléchi.

Elisabeth, MON Elisabeth n’allait pas mourir.
Certes, allait prendre des médicaments à vie, ça n’allait pas être facile, elle allait en chier mais elle n’allait pas mourir et elle allait vivre !!
Oui, elle allait avoir des moments plus que pénibles, mais j’allais être là et Thomas aussi.

Le samedi arrive, nous passons la journée ensemble.
On en parle naturellement et j’aime ça - j’en ai besoin.
J’ai besoin d’en parler.
Et je pense qu’Elisabeth aussi.

Cette maladie n’a pas de place entre nous, elle n’affectera jamais ni notre amitié, ni mes sentiment envers Elisabeth.
Et elle l’a compris.

Personne de nos amis en commun ne le sait.
C’est son secret.
Si j’ai besoin d’en parler, c’est avec Elisabeth directement que j’en parlerai.

Dans quelques semaines, je vais la retrouver.
Toutes les deux, loin de tout.
Besoin de la voir, besoin de me retrouver avec elle.
J’ai hâte !
Elisabeth, c’est mon bonheur !


Ma jolie, c’est pas trop mon genre de me dévoiler comme ça, mais je pense que c’est important que tu le saches.

Je t’aime.
Noémie.

jeudi 9 avril 2009

Noémie, oh ma Noémie..

Noémie, je la connais depuis quelques années déjà.
On s'est découvertes alors qu'on vivait chacune une déception amoureuse. Et puis ensuite, on a connu nos années de célibat, un petit temps au chômage...tout ça en même temps ou presque ! Jusqu'à ce qu'elle trouve un travail à l'étranger, jusqu'à ce que je rencontre Thomas.

Nous avons plein plein d'amis en commun. Des amis à qui nous tenons, que nous aimons.
Alors quand on a décidé de se retrouver une semaine chez elle, je m'étais dit qu'elle ne devait pas savoir. Non pas que je la pensais indigne de confiance, mais parce que j'avais peur de mettre le doigt dans un engrenage, j'avais peur qu'elle aie ensuite envie d'en parler. Ce qui en soit est plutôt sain. Mais qu'elle aille en parler à des personnes que je connais. Donc je ne devais pas lui dire.

Je débarque donc chez elle un samedi soir. On est contente de se voir. Je pose mes affaires et on file au resto.
Elle me demande de mes nouvelles, je souris jaune en sortant mon sempiternel discours de cachotière : "tout va bien...les poumons n'ont pas de traces, la pneumonie est finie... tout va bien".
ça devait faire 3 ou 4 mois que j'avais appris ma séropositivité. J'ai tenu jusqu'au resto, soit 3 minutes 30. Dès que je me suis installée, j'ai fondu en larmes. Je lui ai tout raconté au milieu de mes sanglots et du resto. Elle s'est levé, s'est assise à mes côtés et m'a prise dans ses bras. Et elle m'a écoutée. Pas de question...juste l'oreille tendue. Et voilà...tout naturellement, tout plein de pudeur et de respect.

Les jours suivants, elle m'a posé quelques questions, je lui ai répondu. Sans les sanglots. Aujourd'hui, j'ai toujours autant hâte de la retrouver, de l'appeler. Je suis moi, je n'ai pas changé, elle n'a pas changé.
L'a-t-elle dit à d'autres personnes ? Je lui ai demandé de me dire à qui elle le disait et d'éviter de le dire à des personnes que je connais. J'ai confiance.

Et je ne regrette absolument pas de lui avoir dit.

La preuve ? On s'est organisé un petit week-end loin de chez moi, loin de chez elle, rien qu'elle et moi. Comme au bon vieux temps.

jeudi 2 avril 2009

Ce fossé qui nous sépare et que tu ignores

Une semaine et demi de nouveau traitement qui est censé me faire mal au ventre, au sommier, et me creuser les joues.... J'ai pratiqué intensément la méthode Coué :"je vais bien, je vais bien, my body is a warrior..."
Résultats : je vais bien. Un peu mal au ventre, mais c'est supportable. Pour le moment. Tout reste relatif dans ce monde pétri et cuit dans l'incertitude. Par contre, je ne me souviens plus du tout de mes rêves maintenant et je n'ai plus du tout l'effet gros joint...Dommage !

Je vous en parle parce que vous, vous savez. Vous connaissez mes inquiétudes vis à vis de ce nouveau traitement. Vous savez que le chemin de la maternité est pavé de grosses épreuves pour moi... J'ai des amis, des personnes de ma famille, qui ne savent pas, qui ignorent tout. Cette ignorance met de la distance. Si seulement ils savaient par quoi je suis en train de passer...ça ne changerait surement pas grand chose. Mais ça réduirait ce fossé énorme que j'installe entre eux et moi.

Pour moi, il y a clairement ceux qui savent et ceux qui ne savent pas. Pouvoir en parler librement, c'est pouvoir exister entièrement. Je me souviens d'une longue conversation téléphonique avec mon amie Noémie, au cours de laquelle je lui expliquais mon avancée, mes découvertes de la maladie, etc. Je me souviens que je me sentais vachement libre, vachement moi. Noémie, je l'aime d'amour. Mais j'en reparlerai une fois.

Avec ceux qui ne savent pas, je me cache pour prendre mon traitement, je mens quant à une éventuelle grossesse (je dis que je prends mon temps !!!), je mens sur l'année 2008 qui a révélé mon virus, je cache ma fausse-couche il y a un an et demi... Et évidemment, j'en viens à m'éloigner d'eux. Je m'aperçois que je n'ai pas appelé certaines personnes depuis presque un an. C'est long un an. J'ai peur de leur parler, j'ai peur de ce fossé, de ces mensonges, de ces non-dits qu'ils ne sauront probablement jamais.

Il y en a même certains qui ignorent mon hospitalisation... 3 semaines qui ont fait basculé ma vie, 3 semaines tombées dans le trou de l'oubli.

Plouf ! Le fossé est crée.